Pourquoi l'ouragan Hélène a-t-il frappé si fort ?
Irma en 2017, Michael en 2018 et Ian en 2022 : l’ouest de la Floride est dans le viseur des ouragans majeurs ces dernières années. Il est 21H00 heure locale ce jeudi 26 septembre. La côte ouest de la Floride retient son souffle. Hélène, un ouragan de catégorie 4 s’apprête à frapper le littoral et notamment la région du Big Bend avec des vents moyens à 225 km/h dans le mur de l’œil et des rafales supérieures à 250 km/h. Le dernier message du National Hurricane Center avant l’impact (aussi appelé landfall) est sans équivoque : Hélène est un ouragan « extrêmement dangereux », une élévation du niveau de la mer (appelée onde de tempête) « catastrophique » est attendue. Dans l’intérieur des terres, les bandes périphériques de l’ouragan apportent déjà des pluies diluviennes. Le pire est à venir ! Il est près de 22H00 : le mur de l’œil puis l’œil touchent terre. La ville de Cedar Key est sous les eaux : l’onde de tempête atteint 4,50 mètres, l’eau arrive au niveau des toits, nuit de cauchemar ! L’ouragan s’enfonce rapidement dans les terres et touche durement les États de Géorgie et la région d’Atlanta, le Tennessee, les deux Carolines ainsi que la Virginie. La côte ouest de la Floride est ravagée par l’onde de tempête, les États de l’intérieur par les inondations jugées « catastrophiques » et « historiques » par le National Hurricane Center. En l’espace de 48 heures, il tombe 751 mm à Busick, à l’ouest de la Caroline du Nord, au niveau des contreforts du massif des Appalaches.
Le bilan humain est catastrophique. Au moment où j’ai écrit cette chronique (au soir du 3 octobre), on comptait 155 décès dont 2 en Virginie, 4 dans le Tennessee, 14 en Floride, 25 en Géorgie, 36 en Caroline du Sud et 74 en Caroline du Nord, principalement à proximité d’Asheville, une ville meurtrie par l’une des pires catastrophes climatiques de l’histoire de cet État du sud-est américain. Hélène est de loin le deuxième ouragan le plus meurtrier de la période contemporaine aux États-Unis derrière l’incroyable bilan de l’ouragan Katrina qui avait dépassé 1800 morts à la Nouvelle-Orléans en 2005. Précisons que près de 600 personnes sont toujours portées disparues ce qui fait craindre aux autorités un bilan bien plus lourd encore. Quant au bilan matériel, c’est encore trop tôt pour l’établir. Cependant, on ne prend pas trop de risque en disant qu’il se chiffrera à plusieurs milliards voire plusieurs dizaines milliards de dollars. C’est également Katrina qui détient le triste record avec près de 120 milliards de dollars de dommages.
Comment peut-on expliquer une telle catastrophe ?
Pour l’onde de tempête, c’est bien connu : la pression très basse au cœur de l’ouragan ainsi que les vents violents qu’il génère sont à l’origine de l’élévation du niveau marin. Plus un ouragan est à la fois intense et de grande dimension, plus l’onde de tempête a des probabilités d’être importante. Par ailleurs, elle peut aussi être amplifiée par des fonds marins peu profonds. Hélène était à la fois intense (catégorie 4 sur une échelle qui en compte 5) et large ; c’est donc en toute logique qu’il a généré cette onde de tempête de très grande ampleur. Quant aux précipitations diluviennes qui ont concerné les États à l’intérieur des terres, elles ont bien sûr été provoquées par le passage de l’ouragan lui-même mais aussi et surtout par le passage d’une exceptionnelle rivière atmosphérique amplifiée par le relief des Appalaches (on appelle cela le forçage orographique) avant que l’ouragan atteigne les côtes de Floride.
Comment le changement climatique a-t-il amplifié l’ouragan Hélène ?
Pour répondre, il faut faire appel à la physique, à la thermodynamique mais aussi à la géographie en exploitant plusieurs échelles géographiques. Revenons quelques jours seulement avant l’impact. Hélène, qui se trouve alors au nord-est immédiat de la presqu’île du Yucatan (au Mexique), passe au-dessus d’eaux à 30-31°C en surface, soit 3°C au-dessus de la normale. Les climatologues estiment que ces températures ont été rendues, à cet endroit précis, 500 fois plus probables avec le changement climatique ! Il est très probable que ces eaux anormalement chaudes puissent expliquer l’intensification rapide de l’ouragan ainsi que le contenu en eau exceptionnel de la rivière atmosphérique qui a touché la région du sud des Appalaches et notamment l’ouest de la Caroline du Nord. A l’échelle planétaire, des études récentes confirment l’augmentation rapide du contenu en chaleur de l’océan global : le rythme du réchauffement a presque doublé depuis 2005. Par ailleurs, la fraction de la surface océanique mondiale affectée par des vagues de chaleur marines d’une durée de plus d’un mois a été multipliée par 5 entre le milieu des années 2000 (environ 12%) et 2023 (environ 55%). Ce sont toutes ces données qui contribuent clairement à amplifier la thermodynamique de ces cyclones tropicaux. Et un dernier petit billet pour la route ! Prenons la direction des pôles où la fonte des inlandsis groenlandais et antarctique contribuent et contribueront de plus en plus à l’élévation du niveau marin. Le destin des littoraux est et ouest de cet État vulnérable qu’est la Floride dépend aussi de régions du monde qui n’ont rien de tropicales !
Crédit visuel NASA
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